Dans le domaine scientifique des Neurosciences, depuis plus de 25 ans maintenant il existe un nouvel axe de recherches passionnant qui se situe à la croisée de deux mondes complètement différents: le monde des contemplatifs (notamment ceux pratiquant la méditation de la pleine conscience) et le monde des scientifiques travaillant sur le cerveau. J’ai eu l’occasion de rencontrer un jeune chercheur italien Marco Sperduti, diplômé de la faculté deRome où il a soutenu une thèse en Psychologie Cognitive, vivant en France depuis plus de 7 ans et chercheur à l’Institut de Psychologie de l’Université Paris Descartes (Paris V) dans le laboratoire Mémoire et Cognition. Je lui ai demandé de nous présenter en quelques mots ce que sont les recherches sur la pleine conscience et de nous faire le point sur l’avancement de ce type de recherches en Italie et sur les collaborations éventuelles entre chercheurs français et chercheurs italiens. Je laisse la parole et la plume à Marco.
En premier je souhaiterais dire quelques mots sur ce que l’on entend avec le terme « pleine
conscience » en anglais « mindfulness ». Il a été introduit dans les années 80 aux Etats Unis par le Professeur. John Kabat-Zinn pour indiquer une forme de méditation sécularisée (principalement inspirée de la tradition Bouddhiste) qui consiste, selon la définition donnée par le même auteur, à porter volontairement et sans jugement sa propre attention aux expériences du moment présent. Vu ses applications en médecine et en psychothérapie, la « mindfulness » a attiré très rapidement l’intérêt de chercheurs dans différents domaines de la recherche allant de la psychologie clinique aux neurosciences avec le but de clarifier son efficacité thérapeutique et les mécanismes cognitifs et cérébraux impliqués. Son efficacité a été notamment démontrée dans la prévention des rechutes dans la dépression, dans la gestion du stress et dans l’amélioration de différentes capacités cognitives comme l’attention et la mémoire. En Italie, cette discipline a reçu un très large accueil témoigné par la présence sur le territoire de plusieurs associations ayant comme but le développement, à travers l’organisation d’événements culturels et la formation d’instructeurs, de la « mindfulness » dans les milieux sociétaux, sanitaires, cliniques et au
niveau de l’éducation, comme par exemple « l’Associazione Italiana per la Mindfulness » ou le « Centro Italiano Studi Mindfulness ». En plus récemment, différents masters
universitaires visant à la formation des étudiants ont été créés dans plusieurs facultés italiennes :
la faculté de psychologie de La Sapienza de Rome, la faculté de médecine et chirurgie San Luigi
Gonzaga de Turin, le département de philosophie, sociologie, pédagogie et psychologie appliquées de Padoue et le département de Neurosciences et Psychologie de l’Université
de Florence. L’université La Sapienza de Rome a également accueilli en 2013 la première conférence internationale sur la « mindfulness » réunissant chercheurs en psychologie et neurosciences et des contemplatifs, témoignant ainsi du dynamisme et du rôle de premier plan de la communauté scientifique italienne dans ce domaine. Rôle qui est aussi confirmé par le nombre de scientifiques italiens de haut niveau qui ont apporté une contribution fondamentale à la compréhension des mécanismes psychologiques et cérébraux sous-tendant cette pratique comme Antonino Raffone de l’Université de Rome, Alberto Chiesa de l’Université de Bologne et Giuseppe Pagnoni de l’Université de Modena e Reggio Emilia. Je me suis moi-même intéressé dernièrement
à l’effet de la méditation sur le fonctionnement et je suis responsable d’un projet de recherche
visant à tester les bénéfices des pratiques de méditation sur le vieillissement cognitif, en particulier de la mémoire. Les résultats, bien que préliminaires, sont pour le moment encourageants.
Pour conclure, je dirais que même s’il faut rester dans le présent, comme un bon pratiquant de
« mindfulness » est sensé faire, le futur de la mindfulness est très prometteur.
Je remercie Marco d’avoir pris le temps de présenter ce sujet très pointu aux lecteurs de LA VOCE.
Marie José Archieri